Petite digression.
Il y a quelques jours, un ami (rencontré grâce à ce blog) me dit s’intéresser à l’œuvre de René Boylesve. René Boylesve né en 1867, la même année que Jean-Paul Toulet, me précise-t-il. Et bien je ne connais pas cet auteur! Avant de chercher sur la toile, une intuition et je feuillette un livre acquis à cause de Derème : Dédié à l’amitié et aux souvenirs, Plon 1947, Jean-Louis Vaudoyer, un recueil de nécrologies ou d’anniversaires dirait-on aujourd’hui, rédigés par ce journaliste, critique littéraire et romancier. A côté de Tristan Derème donc (son hommage paru dans le Divan en 1942), Toulet, Mansfield, et bien d’autres, Boylesve :
René Boylesve 1867-1926
« …Ce soir, nous pensons surtout à l’homme. Les livres de Boylesve gardent pour le lecteur futur toute leur féconde substance. Ils sont certainement de ceux qui s’enrichiront avec l’âge, comme de très bons vins. Mais l’homme dépend du souvenir de ceux qui le connurent et qui l’aimèrent. Je songe à sa scrupuleuse inquiétude, à sa lucide gentillesse. J’écoute sa voix profonde qui soupesait, puis égalisait les mots comme la paume du sculpteur palpe, modèle la glaise. Je revois ses grands regards attentifs, dilatés, devant lesquels, parfois, les paupières ne clignaient pas du tout et qui devenaient brusquement le lieu de son visage qui décelait le cœur offensé, la fière réprobation ou l’amer amusement de l’esprit. Tout à coup, les cils battaient vivement sur ces beaux yeux et un petit rire marquait le reploiement, bref jugement plus net qu’une sentence.
Doué d’une clairvoyance presque féroce (qui le désespérait), Boylesve a vu l’être humain dans sa réalité la moins pardonnable. Cependant il a gardé jusqu’à sa mort le besoin de s’évader dans un monde de poésie, dans un monde de mensonges auquel il ne croyait plus, mais par lequel il feignait amoureusement de se laisser duper. Il ne fermait pas les yeux au soleil, au feu qui déchire ce qu’il éclaire ; mais il se vouait en suite à l’astre qui erre dans l’ombre où flottent des baumes mystérieux et compatissants.
La très particulière personnalité de son art réside dans cette insatisfaction fondamentale. Sa mélancolie était celle de l’enfant qui a trop grandi pour mériter de voir encore les fées, mais qui ne se résignera jamais à ne plus les voir et qui, de temps en temps, se donnera courageusement des vacances pour essayer une fois encore de retrouver celles que, si elles passaient sur son chemin, il ne reconnaîtrait plus… (J.L.Vaudoyer, janvier 1937)»
…Tout passe et cela n’est pas ce
Que les gens ont dit assez;
Ils ont écrit que tout passe
Et leurs livres sont passés,
Sauf certains; et les miens, Muses,
Dureront-ils plus longtemps
Qu’une voix de cornemuse
Qui se perd sur les étangs?…
Tristan Derème, extrait du poème CXLVII de la Verdure Dorée.
Donc, une résolution 2008 : lire un roman de René Boilesve !